Aux prud’hommes, «on n’aborde pas un dossier de la même façon si c’est La Poste ou un boulanger» - Libération

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La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, et Edouard Philippe reçoivent les partenaires sociaux à Matignon, le 29 mai. Photo Laurent Troude pour Libération

Pour ménager les entreprises, le gouvernement veut plafonner les indemnités en cas de licenciement contesté. En réalité, les conseillers prud’homaux font déjà la part des choses.

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Un référentiel «indicatif» a finalement vu le jour en novembre. Il suggère un «tarif» selon la durée de présence du salarié dans l’entreprise, bonifié d’un mois pour les quinquas ou ceux qui galèrent pour retrouver un emploi. Mais sept mois plus tard, les juges prud’homaux semblent largement snober cet outil non contraignant. «La plupart des jugements sont déjà proches du barème», estime Sébastien Crozier, conseiller aux prud’hommes de Paris pour la CFE-CGC. En 2016, le ministère de la Justice observait que 80 % des décisions prud’homales condamnaient les entreprises à verser plus de six mois de salaire. C’est le plancher prévu par le code du travail, au-delà de deux ans d’ancienneté du salarié dans une entreprise de plus de 11 salariés. Entre deux et cinq ans d’ancienneté, les sommes représentaient en moyenne 8 mois de rémunération, selon la chancellerie, et 15 mois passés les 20 ans de maison.

Puzzles

A en croire les conseillers prud’homaux, les indemnités «astronomiques» existent, mais sont rares. Sébastien Crozier ne voit le seuil des deux ans de salaire franchi que dans des cas bien précis, en cas d’important préjudice pour le salarié. Comme «des carrières longues sans reproche ou des salariés débauchés ailleurs par leur patron, puis mis dehors après une très courte période».

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Les conseillers assurent aussi pénaliser moins sévèrement les patrons de bonne foi que les multirécidivistes. «Quand on a affaire à des cas récurrents, avec cinq ou six dossiers similaires pour une même entreprise, on charge lourdement, commente Sébastien Crozier. Quand un employeur vient s’expliquer à la barre et qu’il reconnaît une erreur, on essaye de le pénaliser le moins possible.» Imposer un barème ferme rognerait selon eux sur cette marge de manœuvre.

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Seules les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse devraient être concernées, et non les dommages et intérêts destinés à réparer, par exemple, un harcèlement moral ou une discrimination. Dans certains dossiers, les avocats pourraient donc jouer sur ces tableaux pour gonfler leurs demandes. De même que les conseillers qui s’estimeraient limités dans leur pouvoir d’appréciation pourraient trouver des stratégies de contournement. «On a par exemple l’habitude d’accorder entre 500 et 700 euros au titre du remboursement des frais de justice, illustre Sébastien Crozier. Si on considère demain que le barème est trop limité pour un cas de licenciement moralement condamnable, rien ne nous empêchera de monter à 2 500…»

Extrait de Libération - Alexia Eychenne - 6 juin 2017

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