Amende de 63 millions d'euros pour Orange Caraïbe

Quand cessera le bal des faux culs ?

L'Autorité de la concurrence, saisie par Bouygues Telecom Caraïbe et Outremer Telecom, vient de condamner Orange Caraïbe à 63 millions d'euros d'amende pour pratiques anticoncurrentielles sur la téléphonie fixe et mobile en Guadeloupe, Martinique et Guyane.

L'analyse montre cependant qu'il s'agit surtout d'une instrumentalisation de la concurrence, favorisée par la multiplication des instances de régulation, et qui ne profite pas au consommateur final.

La CFE-CGC/UNSA demande donc une révision des modalités d'amende, plus incitatives à un vrai respect du consommateur, et à une rationalisation des instances chargées de veiller aux intérêts dudit consommateur, mais aussi au maintien des emplois, qui constituent in fine la variable d'ajustement.

Ce qui a pu retarder l'arrivée de la concurrence dans les DOM, ce sont surtout les coûts d'investissement risquant de pénaliser les profits

Pour comprendre les enjeux particuliers des territoires concernés, il est intéressant d'aller lire ce qu'en dit le régulateur des télécommunications, l'ARCEP, premier garant du développement de la concurrence dans le secteur des télécommunications pour l'ensemble du territoire français.

On y apprend notamment que tous les opérateurs ayant souhaité exploiter des licences mobiles ont pu les obtenir au fil de l'eau, dans la mesure où il n'y a pas, a contrario du territoire métropolitain, de problème de disponibilité des fréquences. La difficulté majeure d'implantation sur ces territoires tient essentiellement à deux aspects particuliers :

- la petite taille des marchés (Guadeloupe : 447 000 habitants en 2008, Martinique : 401 000, Guyane : 198 000) ;

- le montant élevé des investissements, en raison du relief et des conditions météorologiques spécifiques notamment pour les antennes relais, et des coûts de déploiement de câbles sous-marins, nécessaires pour relier les îles aux continents.

Dans une activité d'infrastructure où les économies d'échelle sont l'élément clef, ces deux contraintes pèsent fortement sur la rentabilité potentielle de ces marchés, et expliquent que les opérateurs s'y implantent avec retard : ils attendent que les modèles technologiques et économiques soient au point, et que le prix des matériels aient été amortis sur des zones plus peuplées.

Rappelons à cet égard que SFR a longuement différé son implantation sur ces territoires, n'étant pas sûr de rentabiliser ses investissements... et que Bouygues Telecom Caraïbe, plaignant dans cette affaire, a vendu son activité à Digicel en 2006, cet opérateur étant depuis devenu le second en parts de marché dans les Caraïbes.

Il est donc quelque peu fallacieux d'instrumentaliser la législation sur la concurrence pour déloger, ou du moins affaiblir, ceux qui s'y sont investis les premiers, lorsque ce sont d'abord les logiques de profit qui ont gouverné l'installation des opérateurs alternatifs.

Selon l'Arcep, l'intensité concurrentielle est tout à fait satisfaisante sur le marché des mobiles Outre-mer

C'est le régulateur qui le dit : « Sur le marché des mobiles, c'est en Outre-mer que la concurrence est la plus développée », et il insiste par ailleurs : « Le secteur de la téléphonie mobile brille par son dynamisme Outre-mer, comme en attestent les taux de pénétration, excédant largement ceux de la métropole. » Ces marchés sont même proches de la saturation : on peut en déduire que les consommateurs y ont trouvé leur compte.

On s'étonnera derechef qu'une autre autorité, celle de la concurrence, établisse un diagnostic si différent... d'autant que certaines des pratiques incriminées, telles que les programmes de fidélisation incitant les clients à se réengager ou encore l'application de tarifs préférentiels pour les appels « intra-réseau » sont courantes de la part de tous les opérateurs en métropole. Et c'est encore l'Arcep qui souligne sur ce point que les consommateurs d'Outre-mer doivent bénéficier, autant que possible, d'une offre équivalente à celle proposée sur le territoire métropolitain.

L'empilement des autorités de régulation conduit donc une fois de plus au brouillage du message, et ne fait qu'encourager la judiciarisation abusive, un acteur pouvant toujours espérer trouver un régulateur qui interprète le contexte à son avantage.

Une amende qui plombe les comptes de l'opérateur sans bénéficier au consommateur... mais au budget de l'État !

Les 63 millions d'euros ne seront pas rétrocédés aux consommateurs. Ils alimenteront en revanche les caisses de l'État... qui n'a donc aucun intérêt à stopper cette cacophonie réglementaire.

En tant qu'actionnaire principal de France Télécom, l'État ne sera pas davantage pénalisé. Ce ne sont pas les actionnaires qui paient, mais les résultats de l'entreprise qui sont impactés. Et l'on peut constater que la Direction de l'entreprise, en pareil cas, ne modifie en rien sa politique de dividende. Elle diminue ses investissements et sa masse salariale, afin de préserver le profit.

Une fois de plus, la politique de concurrence soi-disant au service du consommateur s'avère n'être qu'un trompe l'œil, qui exploite le discours du « client roi » pour masquer les vrais bénéficiaires des profits ainsi réalisés, au détriment de la pérennité des entreprises et de l'emploi.

La CFE-CGC/UNSA réclame une politique plus juste :

- qui restitue au client, sous une forme ou sous une autre, les amendes infligées en son nom ;

- qui taxe directement les actionnaires - à commencer par l'État quand il est actionnaire -, sans impacter les résultats de l'entreprise.

On peut ainsi espérer que lesdits actionnaires, devant lesquels les dirigeants d'entreprises rendent des comptes, se montreront à la fois plus soucieux d'une réelle prise en compte de l'intérêt des clients, en matière de qualité de service par exemple, et d'une régulation plus pertinente.

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