La discrimination n’est pas réellement combattue dans l’entreprise.

On en parle beaucoup, dans la presse, dans l’entreprise, dans les "push-mail" régulièrement adressés aux salarié(e)s, exercice de communication au demeurant bien fait à la première lecture…. mais en réalité les institutions, à commencer par l’entreprise, la combattent-elles réellement ? On peut en douter à en croire les nombreux témoignages des salarié(e)s. Ils ne manquent pas, encore faut-il être à l’écoute des salarié(e)s et se donner la peine d’ouvrir les yeux sur ces pratiques immergées dans les différentes strates de l’organisation.

Parmi, les cinq témoignages vécus ci-après, une constante: la discrimination touche toutes les catégories de salarié(e)s. Cependant, certaines catégories socio professionnelles sont les plus exposé(e)s comme les séniors, les femmes, les salarié(e)s ayant un handicap, les salarié(e)s ayant une appartenance syndicale dont les carrières sont bloquées... [1].  Une autre constante, les salarié(e)s sont paralysées à l’idée d’évoquer ouvertement leurs difficultés car les pressions et toutes les formes d’intimidation exercées dans leur entourage professionnel les enferment dans leur souffrance. On parle dans certains cas de déni ou non reconnaissance du statut de discriminé.

Premier témoignage: la discrimination sur le salaire

Vous entendez souvent ce message « A compétence égale, salaire égal », quelque soit le sexe, le statut, le grade…

Si le message est entendu, dans les faits les écarts de rémunération ont la vie dure. Bien sûr, l’entreprise trouve toutes sortes de justifications pour nous expliquer sa politique inégalitaire de rémunération, nous martelant tous les efforts qu’elle consent dans ce domaine. Parfois, elle en vient même à se dédouaner, recherchant son incapacité à agir ailleurs. Seulement voilà, c’est le cas de discrimination le plus fréquemment rencontré dans l’entreprise et pour une fois les chiffres ne démentent pas ce constat alarmant d’année en année. Elle touche essentiellement les femmes et aussi les hommes dans certaines situations.

Deuxième témoignage: la discrimination sur l’âge

Mon âge devient un handicap me dit-il lorsque j’évoque ce sujet avec lui au détour d’une conversation. Ce n’est pas dit ouvertement mais lors d’une mobilité dans l’entreprise, l’âge, le salaire et parfois une trop longue expérience professionnelle dans l’entreprise (ou trop qualifiée au regard du poste proposé) sont autant de critères qui pénalisent les séniors dans leur recherche. Jamais personne ne l’écrira, il va de soi, puisque la loi, à défaut, punit, mais dit oralement en tête et tête et selon des formules ambivalentes.

Troisième témoignage: la discrimination sur la maternité

La maternité est un heureux événement, me direz-vous ? Pas toujours. Elles nous le disent. Nombreuses sont celles à qui on refuse une promotion (au mieux retardée) parce qu’elles viennent d’annoncer à leur manager leur grossesse (heureux événement souvenez-vous). Bien que les entreprises se défendent de tenir de tels propos, les cas ne sont pas isolés. Tiraillées entre d’un côté leurs responsabilités familiales et de l’autre leurs responsabilités professionnelles, nos collègues féminines sont soumises à une injonction contradictoire non reconnue par l’entreprise. Ici encore, la meilleure façon de prévenir et lutter contre ce cas de discrimination serait de le traiter en corrélant plusieurs indicateurs et facteurs humains.

Quatrième témoignage: la discrimination sur l’état de santé

Dans l’entreprise, un(e) salarié(e) confronté(e) à une maladie chronique est obligé(e) de s’absenter régulièrement. Le discours insidieux est toujours le même. Ces absences répétées, médicalement justifiées, perturbent l’organisation du travail et le bon fonctionnement du service. Qu’elles soient courtes ou longues, elles sont considérées par l’entreprise comme peu conciliables avec ses objectifs de productivité. De plus, les difficultés liées à un état de santé nécessitent un aménagement du poste de travail, pas toujours fait. Les cas de discrimination dans ce domaine ne sont pas rares. Ils peuvent aller jusqu’à une certaine forme d’exclusion, opposant ainsi la/le salarié(e) au reste de l’entreprise.  Exclusion qui peut amener certain(e)s salarié(e)s à ne pas déclarer certaines maladies.

Cette discrimination touche aussi les parents ayant à leur charge un enfant handicapé, notamment dans l’aménagement de leur temps de travail. Elles/ils nous le disent aussi « je suis obligé(e) de me justifier en permanence auprès de mon manager (ou lorsque je change de manager) qui m’oppose parfois une fin de non recevoir pour des raisons liées au fonctionnement du service ». Ce type de discrimination montre à l’évidence que les charges familiales, mêmes les plus exceptionnelles, sont rarement prises en compte dans l’organisation « actuelle » du travail (« actuelle » car il est possible de modifier positivement notre vision et organisation du travail).

Cinquième témoignage : Vie dans l’entreprise et vie privée ne font pas bon ménage, une discrimination sournoise et peu reconnue

Nombreux sont les salarié(e)s qui sont confrontés à des accidents de la vie « des divorces, la perte d’un être cher…. ». Quoiqu’on en dise, ces tranches de vie privée, éprouvantes, sont peu reconnues par l’entreprise qui aurait même tendance à les opposer à l’image qu’elle se fait d’un(e) salarié(e) modèle, c'est-à-dire totalement engagé(e) à son service. Ici encore, cette forme de discrimination insidieuse peut avoir des répercussions dans une carrière professionnelle, les mises à l’écart de toutes responsabilités, les changements brusques de carrière imposée par l’entreprise existent (à nouveau, une approche méthodique permettrait de combattre cette forme de discrimination).

...

Nous pourrions ainsi énoncer sur plusieurs pages toutes les formes de discrimination vécues dans l’entreprise, certaines dénoncées, d’autres ignorées (par ex la discrimination sur les apparences ou encore certains comportements sexistes). Elles ont toutes un point commun, elles sont choquantes, insupportables et vécues silencieusement et douloureusement.

La douleur (une souffrance morale et physique ignorée par l'entreprise) est d’autant plus intense que la discrimination est dans certains cas, directe et dans d’autres, le plus souvent, insidieuse et persistante. Elle s’immisce dans tous les rouages de l’entreprise, à des degrés différents :

> opposant les plus vulnérables (les discriminé(e)s) au plus forts (les discriminant(e)s) à l’origine de certaines méthodes de management,

> opposant un prétendu intérêt collectif, à l’intérêt individuel, à partir du moment où cette distinction légitime le discours discriminant,

> opposant les valeurs de l’entreprise et une certaine image de marque qu’elle veut donner à ses clients, ses actionnaires…à des valeurs plus humaines, plus conciliantes où chacun serait reconnu pour ce qu’il est et non pour ce qu’il doit seulement produire.

Qu’elle soit avouée ou inavouée, les salarié(e)s en sont les premières victimes.  Elles/ils sont victimes d’une triple peine, la non reconnaissance et la banalisation de leur souffrance, la punition face à cette souffrance et le douloureux combat qu’elles/ils doivent mener face à l’entreprise pour lutter contre ces comportements discriminatoires et faire valoir leur dignité.

La discrimination n’est pas un sujet spécifique, isolé, banalisé ou bien le fruit du hasard. Elle concerne tout le monde, quelque soit son âge, son sexe, sa situation professionnelle et personnelle. Si la loi constitue un premier rempart, son traitement à la source en constitue une autre et dans ce domaine, il reste beaucoup à faire dans l’entreprise. En tout cas, la CFE CGC UNSA / Unsa, en tant qu’acteur social responsable, n’aura de cesse de dénoncer ces comportements discriminatoires, l’objectif est double : accompagner et protéger les personnes discriminées et infléchir volontairement la politique managériale et RH de l’entreprise dans ce domaine où les mesures préventives tardent à venir.

 

Quelques points de repère :

Discrimination telle que définie par les Prud'hommes: "Sur le plan juridique « une discrimination génère un traitement défavorable en considération d'un motif illicite » : Aux termes de l'article L1132-1 du code du travail sont illicites des faits ou décisions qui directement ou indirectement ou par association affectent des personnes en raison de leur «origine, leur sexe, leurs mœurs, leurs orientations sexuelles, leur âge, la situation de famille et la grossesse, leurs caractéristiques génétiques, l'appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, leurs opinions politiques, leurs activités syndicales ou mutualistes, leurs convictions religieuses, l'apparence physique, leurs noms de famille, leur état de santé ou leur handicap».

[1] Les catégories socio professionnelles les plus exposées : les séniors, les femmes, les personnes atteintes de maladies chroniques, les personnes handicapées ou les parents avec un enfant handicapé, les salarié(e)s syndiquées, les militants, adhérents, les personnes ayant des appartenances politiques, ethniques.

Ce que dit le code du travail : en principe, c'est celle ou celui qui formule une réclamation qui doit prouver que sa réclamation est fondée mais en cas de discrimination et quelque soit la nature de cette discrimination, la charge de la preuve repose toujours sur l'employeur (article L1134-1 du code du travail).

La jurisprudence : selon l'article de Liaisons sociales Europe N° 302, "La chambre sociale de la Cour de cassation (Cass. soc. 7 février 2012, pourvoi n° 10-1a9505) adopterai une position innovante et favorable aux salariés sur la portée du régime probatoire en matière de discrimination liée à l’origine ethnique..."

La Cours d’Appel de Versailles (Cass. Soc., pourvoi n° 10-19505) a adopté le 7 février 2012, une position innovante en matière de discrimination portant sur l’évolution de carrière, liée à l’origine ethnique : reconnaissant la « discrimination, directe et indirecte, notamment en matière de promotion professionnelle et de rémunération en raison de l’origine, l’appartenance ou non-appartenance vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race ».

Par un jugement rendu par le TGI de Paris le 10 novembre 2011, les juges ont enjoint l’entreprise à communiquer au comité d’établissement de VMF la ventilation des rémunérations selon les statuts de fonctionnaires et salarié(e)s de droit privée. Une avancée juridique qui permettra, espérons le, des mesures correctives sur les écarts de rémunération constatés depuis plusieurs années et régulièrement contestés par la CFE CGC UNSA. / Unsa

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