Vous ne viendrez plus travailler en Flex par hasard !

Vous avez certainement entendu parler de Flex Desk ou Flex Office (bureau flexible en français) ou encore d’espaces dynamiques, managés… autant d’anglicismes ou discours euphémisés derrière lesquels se cache la même définition, des bureaux non nominatifs, non attribués, sans aucune intimité sur lesquels vous ne pouvez plus laisser vos affaires personnelles. Rien de tel pour faire de vous un salarié(e) éphémère, nomade mais hyperconnecté.

patrick auger
Par Patrick Auger

luis carlos davila
et Luis Carlos Davila

Il est fini le temps des cathédrales, place au tout Open Spaces

À l’instar des belles années où l’Open Space devenait la norme, des espaces de travail ouverts et conviviaux vous disaient-ils !

À cette époque, ils vous vantaient déjà les bienfaits des open-spaces afin de faciliter les échanges et le travail collaboratif. En réalité, la proximité physique sur un même espace de travail ne rime pas avec communication informelle.

À cette époque, ils ont déjà eu l’idée de multiplier les petites boites afin de s’isoler et téléphoner, les face-à-face étriqués avec comme seul horizon des écrans de PC et des pseudo cloisons soi-disant acoustiques, les éclairages artificiels et les ventilations mécaniques qui soufflent le froid en hiver et le chaud en été… bref, à en croire les belles promesses, toutes les conditions étaient déjà réunies avec les Open Spaces pour que vous puissiez travailler dans des environnements bruyants et stressants.

Dans le monde d’après, on partage… son bureau

Les confinements sanitaires, les faibles taux d’occupation constatés dans les immeubles, et par la suite la généralisation progressive du télétravail sont passés par là et ont parachevé un nouveau concept « le desk sharing ». Comme pour son prédécesseur l’open-space, le desk sharing n’a comme autre finalité que de rétrécir et standardiser plus encore les espaces de travail. Alors, ne rêvez pas trop !

Fini donc le télétravail 5j/5j (et le travail sur site 5j/5j) et bienvenue dans le monde du Flex (bureau flexible) en mode panoptique et digital (la flexibilité étant entendue comme une nouvelle forme d’astreinte où les salarié(e)s hyperconnecté(e)s sont à la disposition permanente de l’employeur). Avec le Flex, la magie du don d’ubiquité a fait son œuvre et les salarié(e)s vont devoir alterner travail sur site en présentiel et travail à domicile en distanciel.  La Direction étant pionnière dans ce genre de concept, le Flex s’est donc imposé comme sa seule réponse aux retours sur site post-confinement !

Mais la Direction a oublié de s’interroger sérieusement sur cette nouvelle organisation du travail hybride et n’a pas tiré tous les enseignements des confinements sanitaires révélés à cette occasion en faisant fi des inégalités sur le télétravail contraint et subi (tout le monde n’est pas logé à la même enseigne). Comme si avec le Flex, la standardisation et la norme devenaient le leitmotiv et s’imposaient à tout le monde, quelle que soit les besoins différenciés des postes de travail. Un modèle de gestion hors sol, discriminant dans certains cas (handicap par ex.), qui s’érige comme seule vérité, où la réduction des coûts et des m² se fait aux dépens du bien-être, du bien faire au travail et de l’équilibre Vie Privée / Vie Professionnelle de tout un chacun.

Démotivateur pour revenir au bureau

Il est à parier qu’avec ces nouveaux espaces de travail dits flexibles, les salarié(e)s, heureux de retrouver leurs bureaux, leurs collègues et leur environnement de travail n’aient vraiment plus envie de revenir sur site malgré les difficultés que certains d’entre eux rencontrent en télétravail : manque d’espace, surmenage, imbrication dans leur vie personnelle, surcharge de travail… Vous l’aurez compris, le télétravail n’est pas non plus une partie de plaisir pour tout le monde et selon une étude réalisée par Work Trend Index, le temps passé dans les réunions Microsoft Team a bondi de 250% en l’espace de 2 ans pour un utilisateur moyen.

Et comme si cela ne suffisait pas, les principaux motifs évoqués dans la généralisation des Flex Office nous renseignent sur les ruptures annoncées : 

  • Des bureaux sans âme, uniformes, déshumanisés, insipides, impersonnels,
  • La multiplication des espaces de travail étriqués, sans aucune intimité, qui ne répondent pas au besoin de confort, de calme, de concentration et de confidentialité recherchés par la très grande majorité des salariés,
  • La précarisation des conditions de travail et des salariés obligés de s’adapter à leur environnement en totale opposition avec le Code du travail qui érige en principe d’adapter le travail à l’homme et non l’inverse,
  • La désorganisation du travail où les collectifs de travail sont dispersés et les repères professionnels sont en perpétuelle reconfiguration, dans le seul but de transformer tout bon professionnel en un apprenti à vie,
  • Une perte de temps en arrivant sur site (la galère du Flex) à rechercher un poste de travail et retour chez soi par manque de bureaux si le taux de remplissage et de rotation à la cible ne sont pas suffisamment calibrés ou si les outils permettant de gérer ce taux d’occupation sont inexistants,
  • Des rotations inter journalières favorisant la propagation des germes infectieux entre salariés, notamment dans les cas de virus saisonniers ou pandémies qui n’en finissent pas et une augmentation probable de l’absentéisme,
  • Double stress pour les salariés qui ne disposent pas de conditions de travail optimales en télétravail, n’ont plus de bureau individuel et subissent le Flex contraint,
  • La quête effrénée d’une culture unidirectionnelle fondée sur la rationalité, le contrôle et la dépersonnalisation des individus et des outils de travail.

Ce qu’en dise les études

Un baromètre international réalisé par ACTINEO en 2021 (l’observatoire de la qualité de vie au travail) a révélé que les salarié(e)s sont particulièrement sceptiques vis-à-vis du Flex tel qu’il est actuellement conçu, préférant des postes de travail attribués dans des espaces fermés, et cette préférence n’est pas une spécificité française. Une autre étude réalisée par Essec Workplace Management en juin 2021 montre que seuls 4% des salariés se disaient favorables au Flex Office.  Selon ces mêmes études, le bâtiment doit avant tout rester un lieu de socialisation, de projets communs porteurs de sens, de valeurs et d’espaces de convivialité où il fait bon vivre, dans une ambiance détendue favorisant les relations informelles. Nous en sommes loin !

Vous l’aurez compris, le Flex n’est pas la panacée, et si l’entreprise en tire des avantages financiers (m², loyers, facture énergétique, restauration…), là encore, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. A contrario, la prime mensuelle que les télétravailleurs perçoivent est très insuffisante et surtout ne couvre pas tous leurs frais. Ils sont nombreux à nous le dire « avec la flambée du prix des énergies notre pouvoir d’achat va baisser ».

Remboursement du télétravail : Orange pourrait faire mieux, comme la plupart des entreprises

La jurisprudence est pourtant très claire à ce sujet et la plus haute juridiction a posé comme principe général que les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur doivent lui être remboursés, sans pouvoir être imputés sur sa rémunération. L’URSSAF a même précisé l’ensemble des quotes-parts frais des frais fixes et frais variables du local d’habitation à usage professionnel. A nouveau, la Direction s’obstine à ne pas vouloir entendre nos revendications et ne veut pas revaloriser significativement cette prime ou si peu !

Nous ne sommes pas que des dépenses !

En réalité, en réduisant le champ des possibles à une seule équation économique et une occupation optimale des m² au détriment du bien-être et de l’efficacité des salarié(e)s, sans réfléchir aux grands principes qui régissent cette nouvelle organisation du travail hybride, il se pourrait bien que cet effet de mode produise l’effet inverse, c’est-à-dire dégrade les conditions de travail, déshumanise les environnements de travail, démotive les salariés et finisse par fracturer/éclater plus encore les collectifs de travail avec de probables impacts sur la performance globale de l’entreprise (certaines entreprises font déjà marche arrière). En généralisant le Flex Office, gare donc aux illusions comme l’écrivait très justement Jean-Paul Sartre « en voulant être partout à la fois, il se pourrait bien que nous ne soyons réellement nulle part… ».

Nos propositions

  • Avoir à ce sujet un dialogue social sincère et constructif, ce qui n’est pas le cas actuellement. Nous dénonçons une méthode de travail déloyale, rigide et contre-productive avec les Instances Représentatives du Personnel.
  • Remettre la participation des salariés au centre des décisions qui les concernent.
  • Repenser l’organisation du travail hybride en privilégiant la diversification des solutions de travail dites « à la carte » afin de répondre aux besoins des salariés en fonction de la spécificité de leurs métiers, de l’évolution de leurs usages et de leur équilibre Vie Privée / Vie Professionnelle
  • Traiter sérieusement le cas des salariés en situation de handicap pour lesquels le Flex Office n’est pas compatible avec l’aménagement de leurs postes de travail
  • Conduire une vraie politique de Qualité de Vie au Travail avec comme principe qu’il ne peut y avoir de performance économique sans performance sociale.
  • Augmenter significativement la prime de télétravail afin qu’elle couvre tous les frais engagés par les salariés
  • Expérimenter ses nouveaux espaces de travail avec une possible marche arrière si ce n’est pas satisfaisant
  • Développer et expérimenter des outils de communication plus efficaces (exit la mauvaise connexion internet, l’ordi qui rame, des outils collaboratifs trop intrusifs…)
  • Favoriser le développement des tiers lieux (coworking) en complément du télétravail afin de répondre aux nouveaux enjeux de mobilité et environnementaux

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