La CFE-CGC/UNSA propose à la Société Générale de voter le dividende à 1 euro à France Télécom SA

Selon les obligations définies par l’AMF, la Société Générale vient d’indiquer la montée de la banque au capital de France Télécom « dans le cadre de ses activités de négociation » : la banque détient désormais 159.475.905 actions France Télécom et 6,02% des droits de vote de la société[1].

La réaction des marchés à cette acquisition (l’action France Télécom a perdu 1,5% le jour de l’opération) indique qu’il pourrait s’agir d’une pure opération spéculative permettant à la banque de toucher le solde du dividende au titre de l’exercice 2011, qui sera versé le 13 juin prochain. Rappelons que la Deutsche Bank avait procédé à une opération similaire en septembre 2010, revendant ses actions immédiatement après le détachement du coupon[2].

A l’initiative de la CFE-CGC/UNSA et de l’ADEAS, qui défendent la baisse du dividende depuis plusieurs années, les personnels actionnaires proposent, dans la résolution « A » qui sera présentée au vote des actionnaires de France Télécom le 5 juin prochain, de passer le dividende à 1 euro par action, au lieu de 1,40 proposé par la Direction. Cela permettrait à l’entreprise de retrouver plus d’un milliard d’euros de marges de manœuvre pour investir ou se désendetter, dans un contexte économique difficile. C’est en outre la meilleure façon de garantir à l’ensemble des actionnaires la préservation de leur patrimoine.

 

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126 millions d’euros dilapidés en pure spéculation ?

Le 25 août 2010, la Deutsche Bank était également montée à 5,07% du capital de France Télécom… pour redescendre à 3,25% le 31 du même mois. Dans l’intervalle, elle avait empoché 80 millions d’euros au titre de l’acompte sur dividende.[3] Voilà à quoi sert un dividende élevé : à alimenter la spéculation sur les marchés, pendant que le cours de l’action ne cesse de chuter ; la distribution du dividende ampute en effet les fonds propres de l’entreprise, et se répercute mécaniquement sur le cours de l’action.

Selon le montant de 1,40 euro proposé par la Direction de France Télécom à l’Assemblée Générale des actionnaires le 5 juin prochain[4], le solde du dividende au titre de l’exercice 2011 s’élèvera à 0,80 euro (0,60 euro par action ayant déjà été versé en septembre 2011 à titre d’acompte). Les 159.475.905 actions détenues par la Société Générale lui permettraient ainsi de toucher très exactement 127 580 724,00 € de coupon le 13 juin prochain.

La Société Générale envisage-t-elle le même type d’opération spéculative que la Deutsche Bank ? C’est ce qu’ont dû penser les marchés, qui ont immédiatement sanctionné cette soudaine montée au capital, le cours de l’action France Télécom perdant 1,51% à la clôture le jour même de l’opération.

La Société Générale ne versera pas de dividende au titre de l’exercice 2011

Les dirigeants de la Société Générale ont bien compris l’intérêt de conserver le résultat dans l’entreprise, particulièrement en temps de crise : la banque a annoncé en novembre dernier qu’elle ne verserait pas de dividende au titre de l’exercice 2011[5], pour renforcer ses fonds propres d’environ 500 millions d’euros.

C’est pourquoi la CFE-CGC/UNSA et l’ADEAS (Association pour la Défense de l’Épargne et de l’Actionnariat des Salariés de France Télécom-Orange) ont écrit à Monsieur Oudéa[6], PDG de la Société Générale, pour lui demander de soutenir et de voter la résolution des actionnaires salariés, qui vise non à supprimer tout dividende à France Télécom, mais à le ramener à 1 euro par action pour l’exercice 2011.

Une politique de dividende extravagante à France Télécom…

La politique de dividende extravagante menée depuis plusieurs années conduit France Télécom à exiger de ses filiales, y compris celles qu’elle ne possède pas à 100%, la remontée de tout leur résultat dans les comptes consolidés. En retour, les actionnaires au titre des participations minoritaires demandent à percevoir leur dividende. L’entreprise devrait donc verser non seulement 3,7 milliards d’euros aux propriétaires de la maison mère, mais également près de 700 millions d’euros aux propriétaires des participations ne donnant pas le contrôle de l’entreprise.

Avec un dividende à 1,40 euro par action, France Télécom devra donc débourser près de 4,4 milliards d’euros de dividendes au titre de l’exercice 2011… pour un résultat net d’un peu plus de 3,8 milliards d’euros pour la même période !!

… au détriment de l’entreprise et des actionnaires stables !

Le 16 avril dernier, Les Échos[7] notaient que l’action France Télécom avait perdu 60% de sa valeur depuis 2007. Depuis cet exercice, le dividende s’est envolé, passant d’abord à 1,30 pour 2007, puis à 1,40 euro par action de 2008 à 2011 inclus, si l’on s’en tient au montant proposé par le Conseil d’administration pour l’exercice écoulé. Sur 5 ans, cela représente une distribution de 6,90 euros par action, sans compter les frais financiers générés par les opérations de paiement, et, régulièrement, les emprunts dédiés au versement d’un acompte. Le cours de l’action pourrait donc se situer aujourd’hui entre 17 et 18 euros si aucun dividende n’avait été distribué pendant cette période, au lieu des 10,50 euros auxquels elle stagne aujourd’hui.

Les actionnaires stables, dont les personnels actionnaires ou les petits porteurs issus des opérations de privatisation, n’y auraient rien perdu : leur capital aurait été préservé. L’entreprise aurait conservé 18 milliards d’euros de fonds propres, utilisables pour investir et/ou se désendetter, et serait en outre mieux protégée contre une éventuelle OPA hostile. Les fonds propres des filiales, que la maison mère n’aurait pas eu besoin de siphonner, auraient également été renforcés. L’État y aurait perdu du cash, mais aurait maintenu le patrimoine de l’Agence des Participations de l’État, et la capacité d’investissement du Fonds Stratégique d’Investissement, qui lui permet d’investir dans les entreprises qu’il souhaite soutenir.

Les personnels actionnaires de France Télécom proposent le dividende à 1 euro…

Conscients des effets délétères d’un dividende trop élevé, et à l’instigation de la CFE-CGC/UNSA et de l’ADEAS qui défendent cette position depuis plusieurs années, les représentants du personnel dans les Conseils de Surveillance des fonds d’épargne salariale ont demandé que le dividende soit ramené à 1 euro par action, dès l’exercice 2011. Ils souhaitent avant tout assurer la pérennité de l’entreprise et sa capacité à investir, tant dans les infrastructures qui lui permettront de rester un opérateur significatif que dans l’innovation au service de ses clients.

La Direction a du se résoudre à les voir proposer une résolution qui fixe le dividende à 1 euro par action, au lieu de 1,40[8]. Cette résolution « A » sera soumise au vote de l’Assemblée générale des actionnaires le 5 juin prochain, en alternative à la résolution 3 proposée par le Conseil d’administration.

L’adoption de cette résolution permettrait à France Télécom de renforcer ses fonds propres d’1 milliard d’euros.

… et espèrent qu’une majorité d’actionnaires voteront leur résolution,
à commencer par l’État

Les précédentes Assemblées générales ont montré qu’il était difficile aux personnels de faire entendre un point de vue divergent de celui du Conseil d’Administration : leurs précédents votes contre le dividende à 1,40 euro n’avait été suivi ni par l’État, ni par les petits porteurs qui se plaignaient pourtant amèrement, et à juste titre, de la chute du cours de l’action.

Les personnels actionnaires espèrent que le nouveau gouvernement aura une politique plus éclairée à l’égard de France Télécom, et que l’ensemble des actionnaires, notamment ceux qui ont eu confiance dans notre entreprise lors de sa privatisation, comprennent mieux aujourd’hui les mécanismes des marchés financiers : la crise aura au moins eu le mérite de mettre en lumière leurs excès et leurs pratiques délétères pour les entreprises et les États, au détriment des salariés, des citoyens… mais aussi de tous les investisseurs prêts à accompagner loyalement le développement industriel des entreprises dont ils sont copropriétaires.

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