L'invité de la rédaction - France Bleu Bourgogne

Interview de Denis GUEY avec Pierre Morville comme invité. 

DG : En ligne avec nous, Pierre MORVILLE, délégué syndical central CFE-CGC de France TELECOM ORANGE ? Le grand opérateur historique de la téléphonie en France réduit de façon drastique. Nous allons voir pourquoi, et ce qui chagrine le syndicat de cadres.

En mars dernier, la direction régionale de France Télécom Orange, comptait 8100 salariés, soit 400 de moins en un peu plus d’un an ? C’est ce que, dans le jargon interne de l’entreprise, vous appelez le plan Next, pour de nouvelles expériences des télécommunications. Une nouvelle expérience qui se traduit par 22 000 suppressions d’emplois de postes programmées entre 2006 et 2008, et 10 000 changements de métiers au sein du groupe. Alors Pierre MORVILLE, autant d’emplois en moins en si peu de temps, ça parait énorme. D’où est-ce que vous tenez ces chiffres ?

PM : Eh bien, ce sont des chiffres , hélas, officiels ; Quant on voit, quand on prend sur une période de dix ans ou de treize ans plutôt on voit que c’est la plus forte restructuration industrielle depuis la sidérurgie, puisque de 95 à 2005, nous avons perdu 40 000 emplois sous la forme de départs en préretraite, et nous avons eu, de 2006 à 2008, 22 000 suppressions d’emplois qui ont été réalisées.

Et nous pensons… nous estimions que cette décrudescence de l’emploi allait se poursuivre dans les années qui viennent, alors autour de 10 à 15 000 suppressions d’emplois nouvelles dans les trois qui allaient venir, ceci avant la crise économique qui a touché l’économie mondiale, qui aura certainement des effets, y compris sur nos effectifs, sur le pouvoir d’achat des salariés. Et donc, on est dans une situation tout à fait dramatique. Le plus piquant dans cette histoire, c’est que ces suppressions d’emplois se font sans aucune négociation avec les syndicats. Ce qui est une première, je pense, en Europe, dans la mesure où l’entreprise explique que ce n’est pas un plan social, puisque il n’y a pas de licenciement sec, mais elle estime que c’est ou des départs vers la Fonction publique ou des départs volontaires de l’entreprise ; vous imaginez bien que 22 000 personnes ne partent pas volontairement.

DG : Alors, est-ce que vous reconnaissez quand même qu’il y a sureffectif par rapport à une époque où France Télécom a compté autan de salariés, c’était parce que c’était une nécessité, il fallait rattraper le retard français en matière de téléphonie dans les années 70 ; aujourd’hui est-ce qu’il y a un sureffectif qui, à votre avis est justifié, même si le terme n’est pas forcément approprié ?

PM : ….. on a embauché énormément de gens dans les années 70-80 pour rattraper le retard téléphonique de la France, et construire ce qu’on appelle le réseau, il n’empêche pas moins que parallèlement à ces suppressions d’emplois, on constate que la sous-traitance, qui était marginale à France Télécom, représente aujourd’hui l’équivalent de 25 000  emplois….…A temps plein, c’est des équivalents temps plein. Et ça ce sont les chiffres de l’entreprise. Donc, on pourrait imaginer encore une fois, qu’il y a sureffectif, mais quand on voit disparaître, je dirais d’un coté, des effectifs stables et que l’on voit apparaître à peu près l’équivalent en effectif de sous-traitance, on est obligé de se poser des questions sur la réalité de ce sureffectif.

DG : Le problème, c’est que l’entreprise doit gérer aussi une situation délicate, elle compte encore 70% de salariés qui ont un statut de fonctionnaire, autrement dit, on ne peut pas les licencier, donc il faut bien, entre guillemets, les pousser vers la sortie, non ?

PM : Oui, mais de ce point de vue-là, nous nous interrogeons aussi sur la situation, et l’Etat français reste, de loin et de loin, l’actionnaire dominant, c’est lui qui fixe finalement les règles comme actionnaire dominant. C’est lui qui impose… parce que dans cette période, il faut savoir que l’entreprise dégage de formidables bénéfices, nous dégageons sept à huit milliards d’euros de bénéfices par an, et l’actionnaire, lui, a décidé que la moitié de ces bénéfices devait lui revenir, enfin en tout cas devait revenir aux actionnaires, sous la orme de dividendes. Moi, je ne connais pas beaucoup d’entreprises, qui à la fois, versent trois à quatre milliards d’euros de dividendes par an, et qui, en même temps, estiment que la situation est aussi dramatique pour aller pousser dehors ses salariés. De la même façon, l’Etat reste l’employeur de ces fonctionnaires, de nos collègues fonctionnaires. Ces fonctionnaires sont des fonctionnaires d’Etat, d’une certaine façon, prêtés à France Télécom. Donc si l’Etat, actionnaire, décide qu’il y a trop d’effectifs, il y a une simple façon simple, c’est de faire revenir ces fonctionnaires dans la Fonction Publique ; ça serait déjà loyal à leur égard, puisque quand on est dans la Fonction Publique, c’est pour avoir la garantie de l’empli, contre un salaire qui est relativement plus faible que ce qui existe…

DG : ça c’est votre proposition pour compenser les départs, retrouver des postes aux partants.

PM : Notre proposition, c’est de dire, dans cette affaire, dans la mesure où il n’y a pas de négociation, il n’y a pas eu d’accord conventionnel, nous voulons un retour au conventionnel, que ça soit, non pas du traitement au cas par cas, mais que - quelle que soit la situation, que la personne souhaite quitter l’entreprise, qu’elle souhaite créer sa propre entreprise ou retourner dans la Fonction Publique – ça soit des droits et non des accords négociés au gré à gré.

DG : Un dernier mot Pierre MORVILLE, à quel niveau la Bourgogne est touchée dans cette affaire ?

PM : Ecoutez, à la direction régionale, on a estimé, dans les deux dernières années, qu’il y avait eu 600 emplois perdus.

DG : Et comment ça se passe à l’intérieur de l’entreprise, de manière très courte aussi, y a-t-il des pressions, comment est l’atmosphère actuelle ?

PM : Ecoutez, nous, nous avons bâti, alors ce qu’on appelle l’Observatoire du stress, le 6 et 7 novembre prochain c’est les assises, nous avons constaté une montée sans précédent du stress….. sachez que c’est une entreprise qui a une moyenne d’âge de 47 ans où quand on a 50,51 ans, et qu’on vous dit : il faut que vous partiez et quittiez votre ville, que vous alliez à 100 kms, ou alors si la personne subit des pressions incessantes de son management pour partir, pour quitter l’entreprise- parce qu’il y a bien des pressions pour faire partir les gens, ils ne partent pas spontanément – ça crée parmi les salariés un trouble très profond.

DG : Merci Pierre MORVILLE. Vous êtes délégué syndical central CFE-CGC à France Télécom Orange. Bonne journée!

PM :  Merci.

Extrait - interview avec Denis GUEY - FRANCE BLEU Bourgogne - 16 octobre 2008

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