Résultats S1 2024 : E la nave va, mais vers quel cap ?

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E la nave va : Et vogue le navire, en référence au film de Fellini

 

Le Groupe Orange a publié le 29 juillet dernier ses résultats financiers pour le 1er semestre 2025. Selon la Direction, « dans un contexte économique et géopolitique difficile sur de nombreux marchés, nos performances restent solides ». Pure figure de marketing financier qui ne tient pas compte de la présence d’actionnaires minoritaires dans les filiales les plus performantes. Pour la CFE-CGC, Orange SA poursuit son déclin. En effet, les résultats du semestre révèlent plusieurs signaux préoccupants.

Chiffre d’affaires : croissance molle

Le CA s’établit à 19,9 Mds€, en hausse marginale de +0,1% en données historiques et de +0,3% à base comparable par rapport au 1er semestre 2024. Cette croissance molle, inférieure au niveau de l’inflation, contraste avec les ambitions affichées dans le plan stratégique « Lead the Future ».

La zone France perd -2,2% de CA, démontrant l’échec de sa stratégie de « recentrage » et d’opérateur premium dans un marché saturé. Cela ne constitue pas une surprise quand on connaît la situation actuelle de SFR qui avait la même stratégie de positionnement. Sur cette géographie, l’ARPO mobile est en baisse (-0,80€ sur 1 an), l’ARPO fixe n’augmente quasiment plus (+0,10€ sur 1 an) et même l’ARPO convergence est à la peine (+1,40€ sur 1 an).

La zone Europe présente un CA stable, dans un contexte de croissance forte du PIB.

Seule la zone OMEA fait preuve d’une croissance de CA, de +12,8%, grâce à l’expansion de ses réseaux mobile et haut débit fixe et au succès de ses services financiers (Orange Money).

L’activité Orange Business, pourtant stratégique, affiche une baisse de -5,2% de CA, confirmant l’incapacité de la Direction à faire évoluer OB vers une ESN. Les services de connectivité fixes chutent de -7,6% tandis que les services mobiles reculent de -8,0%. Seule Orange Cyberdéfense continue d’afficher une forte croissance.

La CFE-CGC Orange regrette à nouveau l’absence d’exploration de nouveaux gisements de croissance en Europe et le naufrage de l’entité Orange Business.

Glossaire

  • ARPO : revenu moyen par offre.
  • BFR : besoin en fonds de roulement.
  • CA : chiffre d’affaires (revenus des ventes).
  • CFO : cash-flow organique, trésorerie issue de l’ensemble des flux monétaires liés aux activités (CFO ≈ EBITDAaL – eCAPEX – intérêts – impôts).
  • EBITDAaL : bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation, amortissement et après frais de location (EBITDAaL ≈ CA – OPEX).
  • eCAPEX : investissements (acquisitions corporelles et incorporelles) hors achats de licences réseau.
  • ESN : entreprise de services numériques
  • FCF « all-in » : free cash-flow « all-in », cash généré après prise en compte de la totalité des dépenses (FCF « all-in » ≈ CFO – licences télécom – litiges).
  • OMEA : Orange Middle East Africa
  • OPEX : achats externes et charges de personnel.
  • PIB : Produit Intérieur brut (indicateur pays)

En Europe, amélioration de la rentabilité au prix de perpétuels plans d’économies et de suppressions d’emplois

L’EBITDAaL progresse de +3,8% par rapport au 1er semestre 2024 pour atteindre 5,7 Mds€ grâce à la performance d’OMEA et aux plans d’économies en France et dans le reste de l’Europe. La CFE-CGC Orange déplore que cette performance économique soit obtenue au détriment des personnels. Car la stratégie de rentabilité d’Orange, qui mise exclusivement sur la réduction des coûts opérationnels, a des conséquences directes sur les conditions de travail des salariés (cf. les résultats des enquêtes Voice Up et CNPS) mais aussi, à plus ou moins long terme, sur la qualité de service offerte à nos clients et notre capacité à innover pour retrouver de la croissance. Par ailleurs, le bénéfice n’est pas redistribué équitablement : si les actionnaires se voient verser un dividende en croissance, la masse salariale (salaires et emplois) ne suit pas la même dynamique.

Résultat net : effacé par la provision liée aux TPS

Le résultat net consolidé atteint 1,167 Md€, mais une provision exceptionnelle de 1,272 Md€ liée à l’accord sur la Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels (GEPP, incluant un nouveau plan TPS) fait basculer ce résultat net à - 105 millions d’euros. Pour autant, aucune limitation du dividende n’est envisagée, là encore au détriment du futur de notre Groupe, qui n’a plus les moyens d’investir.

Investissements : no future ?

Les eCAPEX demeurent à 15% du CA (15,2% précisément ce semestre). La dangereuse politique d’austérité sur nos infrastructures se poursuit inexorablement.

La CFE-CGC Orange dénonce aussi l’absence d’investissements externes à la hauteur des enjeux : l’innovation et les relais de croissance manquent pour garantir l’avenir du Groupe.

Une dette peut en cacher une autre

Le Cash-Flow Opérationnel progresse de +7,7% à 1,7 Md€, tiré notamment par un EBITDAaL– eCAPEX (accroissement de la marge et baisse des investissements) et une variation de BFR en amélioration. Le FCF « all-in » chute de -13,5% à 1,086 Md€, en raison d’un effet de phasage sur le paiement de licences télécom. L’endettement financier net grimpe à 23,294 Mds€, en hausse de 812 M€ par rapport à fin 2024, notamment à cause du rachat de titres subordonnés. La « dette économique réelle », intégrant l’ensemble des engagements financiers non encore payés par le Groupe ou non consolidés (comme dans ses participations ou les filiales détenues à 50/50 telle MASORANGE), s’élève à 46,4 Mds€.

Des liquidités mais pas d’acquisitions

Le Groupe conserve une position de liquidité importante à 16,2 Mds€ (dont 10,2 milliards de liquidités et 6,0 milliards de crédits non tirés). La CFE-CGC Orange s’interroge sur les motifs d’une réserve financière de cette ampleur. À défaut d’investir et d’innover en propre, le Groupe envisagerait-il de procéder à des opérations de croissance externe ? Après avoir raté plusieurs opportunités (TDF, Atos, La Poste Mobile, …), Orange va devoir rapidement se positionner sur la vente de SFR (en particulier de ses infrastructures XP Fibre) en France et la prise de contrôle de MASORANGE en Espagne, mais également sur le devenir de ses véhicules financiers d’infrastructures (TOTEM pour le mobile et Orange Concessions pour la fibre des RIP – Réseaux d’initiative Publique) qui apparaissent en difficulté opérationnelle.

En somme, derrière une façade de stabilité affichée par le Groupe, les résultats du 1er semestre 2025 traduisent une situation très fragile et offrent le reflet d’une stratégie peu lisible, sans ambition de croissance durable car basée uniquement sur une rentabilité financière à court terme.

Reconsolidation de MASORANGE. Pour 2026 ?

L’accord passé en 2024 entre le Groupe Orange et les propriétaires de MASMOVIL prévoyait une clause de sortie, permettant aux 3 fonds détenant MASMOVIL (KKR, Cinven et Providence) de récupérer leur mise, via un rachat de leur part de capital par Orange, ou une mise en bourse de la co-entreprise MASORANGE.

Le 6 octobre, el confidential (site spécialisé dans les informations économiques espagnoles), a fait état de discussions entre Orange et KKR, Cinven et Providence, menées par Josep Maria Echari (actionnaire minoritaire de MASORANGE) pour la reprise par Orange. Elles seraient dans la dernière ligne droite. Bloomberg avait précédemment rapporté qu’Orange proposait 4 Mds€ pour les 50% du capital à racheter, mais que les autres actionnaires réclamaient 1 Md€ de plus. MASORANGE aurait une valeur de 9 Mds€ + une dette de 11 Mds€, qui serait donc consolidées dans les comptes d’Orange à l’issue du rachat. El confidencial s’attend à une annonce avant la fin de l’année.

Retrouvez les analyses de la CFE-CGC Orange lors de la présentation du projet au Comité de Groupe Européen en 2022.

 

Extrait de la Lettre de l'Épargne et de l'Actionnariat salariés #3/2025

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